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Thomas Pichon (1700-1781)






L’énigme et la contradiction sont parties prenantes des documents qui relatent la vie du fonctionnaire colonial, espion et auteur, Thomas Pichon. Né en France, il joint l’armée française en 1741 et est chargé, en 1745, d’organiser les hôpitaux sur le Rhin inférieur et dans les Pays-Bas. Il fait alors la rencontre de Jean-Louis de Raymond, nommé gouverneur à Louisbourg en 1751, qui le convainc de le suivre dans la colonie, sous promesse d’avancement. Le gouverneur ne tenant pas parole, Pichon promet son allégeance au commissaire ordonnateur de Louisbourg, Prevost de La Croix, rival de Raymond. Au départ de ce dernier, Prevost envoie Pichon à Chignectou où, reconnu pour ses talents littéraires, il est affecté à correction de la correspondance officielle.

Lassitude ou intérêts financiers? Peu importe les motifs de Pichon, il accepte en 1755 la proposition de Scott, commandant du fort Lawrence, qui lui des compensations pécuniaires en échange d’informations sur les manoeuvres françaises. Pendant plus d’un an et sous le nom de Thomas Tyrell, il fera parvenir aux commandants anglais les récits détaillés de l’activité française à Québec et en Acadie: des plans des forts, des copies de documents officiels, tout y est. Durant le siège de Louisbourg, il mine encore plus la position française en recommandant aux Acadiens d’exiger la capitulation et en participant à la rédaction d’une missive envoyée au commandant du fort Gaspereau, de Villeray, réclamant une reddition immédiate de la France.

Fait prisonnier à Halifax, il est envoyé à Londres à la fin de l’année 1755, jouissant d’une pension qui lui permet de consacrer beaucoup de son temps à l’écriture de son livre, Lettres et mémoires pour servir à l’histoire naturelle, civile et politique du Cap Breton, depuis son établissement jusqu’à la reprise de cette isle par les Anglois en 1758, paru en 1760. Essentiellement inspiré de textes qu’il avait rédigés lors de son séjour en Acadie, dont son journal, le livre de Pichon rend une description assez détaillée des îles Royale et Saint-Jean. Malgré ses sarcasmes à l’endroit des missionnaires et sa vision quelque peu faussée de la politique, son oeuvre reste « l’une des rares sources fiables sur les Français en Acadie au xviiie siècle ».