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L'Acadie secouée par des eaux troubles

La période des années 1920 à 1950 est marquée par de nombreux bouleversements et l’Acadie n’échappe pas aux transformations qui se mettent en oeuvre au Canada. En effet, le jeune pays, par sa participation aux deux guerres mondiales, occupe dorénavant une place plus importante sur la scène internationale. Il devra aussi se relever d’une crise économique majeure qui va le frapper durant la décennie des années 1930.

L’Acadie vit au rythme des difficultés économiques qui secouent le Canada, bien impuissant à la chute du marché industriel canadien dans les années 1920, puis à celle des marchés internationaux dans la décennie suivante. La crise, bien qu’elle frappe l’Acadie de plein fouet, est une suite de difficultés qui ont débuté dès les années 1920. En agriculture par exemple, le nombre de fermes au Nouveau-Brunswick diminue de 6% dans les années 1920, et la production agricole n’est plus comparable à celle de la majorité des autres provinces du pays. La période est aussi difficile pour le milieu maritime, les pêcheurs ayant de la difficulté à faire vivre leurs familles. Plusieurs Acadiens vont même choisir de quitter les Maritimes, se dirigeant au Québec ou aux États-Unis, en quête de meilleures conditions de vie. En fait, seul le secteur forestier est en expansion, alors que les pâtes et papiers semblent être le secteur de l’avenir.

Pendant ces années troubles, la nouvelle génération d’intellectuels acadiens va poursuivre sur la voie de ses prédécesseurs, qui ont mis de l’avant des grands projets de colonisation et un régime favorisant la coopération chez les Acadiens. C’est d’ailleurs dans les années trente que le mouvement des caisses populaires acadiennes prend place, suivant l’ouverture de la première caisse populaire à Petit Rocher (N.-B.) en 1936.

Les Acadiens prennent aussi de plus en plus de place dans le domaine de la politique, surtout au Nouveau-Brunswick, où leur poids démographique leur permet d’exercer des pressions sur le gouvernement. Le nombre d’Acadiens sur la scène politique augmente et ceux-ci cherchent à faire la promotion de l’identité acadienne au sein du gouvernement provincial. Malgré tout, les inégalités persistent dans la représentation des populations francophone et anglophone. En Nouvelle-Écosse par exemple, même si les Acadiens constituent le dixième de la population, en 1928, ils n’ont que trois députés sur 43. Par ailleurs, ces tensions entre les anglophones et les francophones ne sont pas le seul fait de l’Acadie; elles règnent dans l’ensemble du Canada.

Ainsi, bien qu’elle constate les progrès qui se sont effectués depuis les années 1880, l’élite doit reconnaître les importants ravages que font l’assimilation de la population francophone et les misères du système d’enseignement public et post-secondaire, qui ne répondent pas aux besoins des Acadiens. L’élite acadienne estime que pour défendre ces grands dossiers, elle se doit d’établir des liens plus solides avec la francophonie, l’union étant un atout important.

Consolidant les liens avec leurs homologues français et québécois, les leaders acadiens s’engagent avec eux à la promotion de la langue française et du développement des communautés françaises en Amérique et au Canada. Sur le plan local, l’élite se fait aussi entendre, affirmant être la porte-parole des Acadiens à travers La voix d’Évangéline, l’Ordre Social et le Petit courrier du sud-ouest de la Nouvelle-Écosse, trois journaux fondés par les leaders acadiens pour défendre le projet de société auquel ils aspirent.