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AÏEULS
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AIR

l'ancienne langue: «Car art aïde moult nature». (Roman de la Rose, v. 13600); «Ainsic m'aïde, ainsic me nuit». (Idem, v. 1889); «De son seigneur merci crier, / Qu'ils ajuent à delivrer». ([Chronique] des ducs de Normandie, I, 180, v. 2823); «De Mahomet j'à ni aurez aiude». (Chanson de Roland); «A l'aïde de Dieu». (Berte [aus grands piés], XLVI); «Savoir quel aïe il vouldraient faire». (VILLEHARDOUIN, XX); «Nos esteit en ajuc». (Sermons [de] saint Bernard); «Celui qui aïde et ce qui noist» (nuit). (Dolopathos).
   On trouve aussi aïever, aidjever dans la vieille langue.

   AÏEULS. Nous disons aïeuls au pluriel pour aïeux. C'est ainsi que l'on disait en vieux français. Aïeux est de formation assez récente.

   AIGAIL. Rosée du matin.
   On a dit, en terme de chasse, chiens d'esgail pour chiens chassant le matin, à la rosée.
   Ce joli mot dont le radical est aqua appartient à la vieille langue: «Le soleil n'a pas bu l'aigail de la prairie». (RACAN, Bergeries, Silène).
   Les paysans du midi de la France l'ont conservé comme nous: «Il y avait un bel égail au lever du soleil».
   Dans la langue des Allobroges, aigagni se dit pour rosée. Même mot, même origine. On pourrait rapprocher aigue-marine de aigail.

   AIGNEAU. Agneau.
   On trouve aigneau, aigniau, aignel, aignelet, dans les auteurs français, à partir de l'origine de la langue (dans Le Roman de la Rose, Bonaventure Des Périers, Saxe, [Jean] de Meung, Paré, Rabelais, Marot, La Passion de N[otre]-S[eigneur] Jésus-Christ, etc.
   «Or, comme un aigneau qui sa nourrice appelle. / Je remplis de ton nom les antres et les bois». (DU BELLAY); «Douz et simples comme un aigniau». (Dolopathos).
   On trouve aigneau dans J.-J. Rousseau, [Du] Contrat social (chap. II, liv. I) et on l'entend chez presque tous les
paysans de France. Agneau, de agnus, est l'oeuvre des scribes, mais il a prévalu dans la langue, ce qui fait que aigneau, de formation populaire, n'est plus que du prétendu patois.

   AIGREFIN. Se dit d'un homme maigrelet, chétif. Pour l'Académie, un aigrefin est une canaille.

   AIGRETTE. Ce mot prend plus d'extension ici qu'il en a au Dictionnaire de l'Académie. Nous avons aigrettes de sapin (spills en anglais), de saule, de charbon, de fleurs. Se dit aussi des déchets, des menus brins de chanvre qui tombent de la filasse, quand on la coche. Et aussi des beluettes de feu qui sortent d'une cheminée.

   AIGRETTER. Faire tomber les aigrettes d'un conifère: un sapin aigretté.

   AIGUILLE. Comme les habitants du centre de la France, nous disons une aiguille pour un timon de charrette.

   AILLEURS. Littré veut que l'on mouille les deux ll. D'autre part, Ménage (XVIIe siècle) nous apprend que le peuple de Paris prononçait a-li-eurs en trois syllabes. Nous prononçons le mot comme le peuple de Paris, au temps de Ménage, le prononçait, et je crois, le prononce encore aujourd'hui.
   Il en est de même de d'ailleurs qui se dit d'a-li-eurs.

   AIN. S'écrit aussi aim, ein, haim. Le P[ère] Sagard écrit lain, en un seul mot. Hameçon, du latin hamus. Le mot remonte très haut: «Force provision de haims». (Pantagruel); «Job dist Diex sau ras-tu pendre (prendre) le dyable à l'aing». (JOINVILLE); «Les aims qui la jeunesse appastent». (RONSARD, Odes); «Femme prant le musart à la gluz et à l'ein». (Rapporté par La Curne [de Sainte-Palaye]).

   AIR. Le mot reçoit, ici, quelques acceptions que je ne lui trouve pas à l'Académie. D'abord, il est aussi bien




Source : POIRIER, Pascal. Le Glossaire acadien, édition critique établie par Pierre M. Gérin, Moncton, Éditions d'Acadie; Moncton, Centre d'études acadiennes, 1993, 500 p.