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ARABI
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ARBOUTANT

malgré lui) que «Thibau demande quelques petites droleries pour guérir sa pauvre mère Parrette; qu'alle est enflée partout; qu'alle a des douleurs dans les muffles des jambes». Je pourrais citer de ces exemples à n'en plus finir.
   On discuta longtemps, à l'Hôtel de Rambouillet (XVIIe siècle), s'il fallait dire serge ou sarge. La grande Arthénice se déclara d'abord pour sarge, puis finit par préférer serge. Serge est resté. Et pourtant, à ce que Vaugelas (Remarques [sur la langue françoise]) nous apprend, toute la cour prononçait sarge.
   Marot fait observer que Villon (XVe siècle), qui était de Paris, fait rimer haubert et appert avec part; terre avec barre; serre avec farre; tertre avec Montmartre; perdre avec garde; verne avec Marne. Dans tous ces mots, e avait le son de a, car Villon, qui est un parnassien de la vieille poésie, rimait richement. Chose assez curieuse, les Anglais, en orthographe, ont pris l[e] e du Dictionnaire de l'Académie, mais continuent de faire entendre a, dans derby qui se prononce darby, clerk qui se prononce clark. Par contre, Pall-Mall, la Pall-Mall Gazette de Londres, se prononce pell-mell au pays du brouillard.
   Ceci nous ramène, inversement, aux e de l'ancienne langue, qui sont devenus des a dans la nouvelle. Et ils sont nombreux sous la Coupole. On en trouve aussi quelques-uns en Acadie.
   Cotgrave, dans son dictionnaire, écrit merque, perfum, perfumer; nous disons marque, parfum, parfumer. Ronsard dédie une ode à sa guitterre (guitare). On disait cherbon à la cour de Henri II et berbe pour barbe. On trouve lerme pour larme dans le Roman de Troie de [Benoît de] Sainte-Maure. Larme est souvent écrit lerme dans les vieux auteurs.
   Avec per, du latin, la langue a fait par: parvenir, parfait, pardonner et par, lui-même. Dans certains mots on trouve l'une des deux consonnes dans le simple et l'autre dans le composé:
barbe et imberbe, par exemple. L'Académie écrit arrière et derrière; nous disons en errière. Il y a confusion sur toute la ligne, comme on le voit.

   ARABI. On a dit, en France, arabi pour arabe: langage arabie. Et l'on dit encore: un cheval arabi. Nos gens — ceux de Campbellton — désignent par ce mot les marchands juifs aussi bien que arabes qui viennent s'établir au milieu d'eux et qui, entre parenthèses, leur font une concurrence ruineuse: «Sept Arrabiz i ad deschevalcet». Il désarçonna sept Arabes. ([Chanson de] Roland, v. 1556). «Par chi passeront ja 4 mille Arabi». (Elie de S[aint-]Gilles, v. 195); «Elies monta el destrier arabi». (Idem, v. 247).

   ARAGAN. Mot d'origine indienne signifiant un panier d'écorce de bouleau.

   ARAGE. (Voir hairage).

   ARBE ou HARBE. (H non aspiré). Herbe. Le mot s'est écrit erbe à l'origine: «Sur l'erbe verte estut devant son tref» (tente). (Chanson de Roland). Puis ce fut herbe, avec l[e] h étymologique du latin herba. Rabelais (Gargantua) écrit arboriser pour herboriser. On disait arboriste sous le Grand Roi: témoin ces vers de La Fontaine: «Tu veux faire ici l'arboriste. / Et ne fus jamais que boucher».

   ARBIÈRE. Mis pour herbière, herbe se disant harbe ou plutôt a-be en Acadie. Arrière-gorge chez les ruminants. On a dit herbière en vieux français ce qui est la même chose: «L'erbière et le josier coupez / Et l'erbière devez nouer». (Le Chant du cerf cité par Godefroy); «Cèdre, cerviss, tout passe par l'herbière». (BASSELIN, Vaudevires). Nous lisons dans Bossuet (Les Merveilles du corps humain): «Au poumon est attachée l'âpre-artère».

   ARBOUTANT. Arc-boutant:




Source : POIRIER, Pascal. Le Glossaire acadien, édition critique établie par Pierre M. Gérin, Moncton, Éditions d'Acadie; Moncton, Centre d'études acadiennes, 1993, 500 p.