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ARBOUTER
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ARMENAC

«Tous ces pieux-là étaient dressés avec des arboutants bien clouez». (DENYS, Description [géographique et historique] des côtes de l'Amérique du Nord, vol. II, p. 91).

   ARBOUTER. Arc-bouter.

   ARCANSON. Colophane. Le mot est plutôt canadien.

   ARCE. Espace suffisant pour se mouvoir: Donnez-moi de l'arce (peut-être devrait-on écrire arse, voir ce mot); Je n'ai pas assez d'arce pour bien manoeuvrer; «Vite Rainouart qui estois strumelé / Les jambes arses et les genous tostés, / Tous ses drapiaus ot rous et despanés». (Cité par Gaston Paris); «Comme il n'y avait pas assez d'arce pour tout le monde dans la chapelle». (ANTONIO LANGLAIS, Mon frère l'curé). Les Normands disent avoir l'airce pour avoir le temps de faire une chose. D'arce ou darse est un terme de marine en France signifiant abri pour petites embarcations. Darce et d'arce pourraient bien être le même mot.

   ARCHICONFRERIE. Mot liturgique de création récente et signifiant confrérie religieuse régie d'après certains statuts.

   ARCULOIRE. Avaloire d'un harnais. Métathèse de reculoire.

   ARDILLE. Se dit pour argile chez certains Canadiens d'en bas de Québec.

   ARGALADES. Vanteries, hâbleries.

   ARGENT. Subst. fém.: de la bonne argent. De l'argent dure, c'est de l'argent monnayé; de l'argent de papier, des billets de banque. Il est malaisé de s'expliquer comment ce mot, formé sur argentum, est devenu féminin, à moins qu'il n'ait été formé sur le pluriel argenta. Les dictionnaires et les auteurs ne l'emploient qu'au singulier,
mais nos gens et les Canadiens disent des argents: «Je comptay mes argents pour en apprendre la somme». (SALLAT, Traduction d'Hérodote). On trouve aussi le pluriel de ce mot au XVIe siècle.
   Argent de papier est une jolie catachrèse.

   ARGOT. Ergot. Argot est la forme ancienne: monter sur ses argots; «Argot, qu'on dit aussi ergot, est le crochet cornu qui est derrière la jambe du coq». (NICOT, Trésor de la langue française).

   ARICOT. Nous avons, comme en France, la plante légumineuse, phaseolus vulgaris, dénommée haricot, mais nous avons aussi l'aricot ou l'haricot des bois, qui est l'abies canadensis, le hemlock des Anglais, la pruche des Canadiens.
   Il serait intéressant d'entendre expliquer comment il se fait, par quel procédé de sémantique, ce mot qui, à l'origine, a signifié ragoût de mouton, est devenu en Acadie, une variété de fèves, en même temps qu'une grosse épinette rouge qui n'a rien de comestible.

   ARMENAC. (Prononcé armena). Almanac.
   Quoiqu'on trouve almenaka dans Eusèbe [de Césarée] (IVe siècle), on n'est pas tombé d'accord sur l'origine de ce mot; on ne sait pas s'il nous vient du copte, du latin, de l'égyptien, de l'hébreu ou du bas grec, almenakhon. Cela n'a guère d'importance, ni non plus la substitution — assez fréquente dans les vocables français — d'un l à un r ou réciproquement. Ce que, peut-être, on pourrait noter c'est qu'Eusèbe et le bas grec donnent, l'un et l'autre, almenac et non pas almanac comme le veut l'Académie.
   Au figuré, faire des armenacs, c'est, comme en France, raconter des histoires invraisemblables, fausses, même: un faiseur d'armenacs. On a hésité entre almanac et armanac au XVIe siècle.




Source : POIRIER, Pascal. Le Glossaire acadien, édition critique établie par Pierre M. Gérin, Moncton, Éditions d'Acadie; Moncton, Centre d'études acadiennes, 1993, 500 p.