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ARROUSER
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ASSAPER

l'auxiliaire avoir: J'ai arrivé au lieu de: Je suis arrivé.
   S'emploie absolument avec le sens de réussir, d'arriver à ses fins: Il est travaillant et honnête, il arrivera; C'est tout ce qu'il pourra faire pour arriver, c.-à-d., il aura beaucoup de peine à nouer les deux bouts, à réussir: Tu n'arriveras pas, tu ne réussiras pas; C'était malaisé, mais il est arrivé. Cette forme de langage était très commune en France au XVIIe siècle.
   Dans: Arrive! Arrivé! on retrouve le terme maritime dont le mot est formé: ad rivam, au rivage.

   ARROUSER. Arroser. Je signale le changement, en Acadie et chez tous ceux qui chousent du o en ou, dans ce mot en particulier, parce que je le trouve fréquemment employé, et par les meilleurs auteurs dans l'ancienne langue: «La charité arrousant une âme, produit en elle», etc., (FRANÇOIS DE SALES, p. 491); «Quand tout auteur eust la chapelle arrousée». (Perceval); «Arrouse doucement le lieu de mon séjour». (RONSARD, Épilogue I); «Ça, que je râcle un peu de tous côtés / Votre cuvier, et puis que je l'arrouse». (LA FONTAINE, [Contes et nouvelles en vers], «Le Cuvier»); «Le sang de nos religieux a arrousé la terre du Japon». (SAGARD, 633).

   ARSE. Subst. masc. Espace, endroit libre, inoccupé: Je n'ai pas d'arse pour me tourner; Faites-lui de l'arse; Il n'a pas d'arse pour placer sa chaise. Donner de l'arse, c'est donner du jeu, du chant. En Normandie, l'on dit airce avec à peu près le même sens (voir arce).

   ARTICLE. Le grec a l'article, le latin classique ne l'a pas, quoiqu'on en trouve des traces dans les Géorgiques de Virgile. Existait-il dans le parler populaire à Rome? Le tenons-nous des langues du nord?
   Quoiqu'il en soit, nous trouvons l'article défini, devant un substantif déterminé, dans les premiers docu-
ments connus de l'ancienne langue: le li Deo inimici de la Cantilène de sainte Eulalie, par exemple.
   Les noms abstraits et indéterminés n'en avaient pas originairement en français. Nous en voyons un exemple dans le perpetita des Gloses de Reichenau dont les Acadiens, et bien longtemps avant eux, leurs aïeux de France ont fait par les petits, rendu dans nos écritures par petit à petit.
   Parfois, au lieu de par les fois, rappelle la première manière, et aussi par terre, par mer, etc. Nous disons ici comme en France: avoir honte, fait tort, prêter serment.
   Les noms de pays et de villes avant le XIIIe siècle n'étaient jamais précédés de l'article. Nous disons encore, en adressant nos lettres: Saint-Laurent, près Montréal, pour près de Montréal.
   L'article est un ancien pronom démonstratif.
   Règle générale, l'emploi de l'article est le même en Acadie qu'en France.

   ASILE. Hospice d'aliénés. C'est la traduction du mot anglais asylum, même sens.

   ASSAPER. Tasser, piler, presser. Le mot reçoit beaucoup d'applications en Acadie: assaper la terre au pied d'un arbre; assaper la farine dans un quart pour en faire tenir davantage.
   S'assaper, c'est se tasser: La neige s'assape, s'est assapée; le foin s'est beaucoup assapé dans la grange durant l'hiver.
   Accourez a presque le même sens: en Anjou; sater en Berri et tapper chez les Canadiens. Cotgrave traduit resapper par: «To underprop, to underset a wall». On trouve assape pour sapeur dans Brantôme. «Ilz (les Viennois) ne furent point battuz de batterie; mais bien de mines et de sapes qui furent faictes par les assapes». (BRANTÔME, vol. I, p. 321). «J'ay par si longtemps jeusné que les jeunes m'ont sappé toute la chair». (Pantagruel, v. p. 1).




Source : POIRIER, Pascal. Le Glossaire acadien, édition critique établie par Pierre M. Gérin, Moncton, Éditions d'Acadie; Moncton, Centre d'études acadiennes, 1993, 500 p.