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BELUETTER
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BERÇANTE

luette en vieux français. Arimam ebulluit, qu'on trouve dans Pétrone, peut se traduire par il évapore son âme, il la met en beluettes.

   BELUETTER. Bluetter, produire des bluettes, jeter des étincelles: «Même il bluette parmi la nuit». (FRANC, Merveilles de la Nature).
   On trouve bluetter dans plusieurs dictionnaires du XVIIe siècle.

   BEN. Bien. C'est de l'ancien français, fort en usage jadis: «Pur nostre rei devun nous ben murir», Nous devons mourir pour notre roi. (Chanson de Roland); «E souvenir vus dait il ben, Amie Yoolet de une ren», Vous devez bien vous souvenir, amie Yoolet, d'une chose. (Tristan). Ben pour bien se retrouve en plusieurs endroits de Tristan et de Roland. On trouve dans la Vie de saint Léger: «Il lo reciut tam ben en fist, / Ab u magistre semprel mist / Qu'il lo doist bien de Ciel savier / Don Deu servi et por bona fied».
   Nous avons ici ben, bien et bona, ce qui montre que la langue n'était pas alors fixée sur ce mot.
   En 1740, Villecomte écrivait: «Presque tous les Français qui se piquent de bien parler prononcent: ça va ben; ça ne vaut ren». ([La] Vie de saint [Thomas le martyr] Thomas Becket). Ben se retrouve dans bénédiction, radical: bene.
   Les Acadiens emploient le mot bien lorsqu'il s'agit de propriétés, de choses possédées: C'est un homme riche; il a beaucoup de biens. Le radical ici est bona.

   BENAISE. Bien aise. Se faire des benaises, c'est se faire des joies (voir ben).

   BÉQUER. Donner un bec, un baiser. Ce que les latinistes moyenâgeux rendent par rostro appetere: Il a béqué sa blonde; le juge lui a fait béquer l'Évangile; «Béquée. C'est ainsi que l'on dit à Paris. Dans les provinces
de l'Anjou et du Maine, on dit béchée». (MÉNAGE). Rabelais aussi dit béchée: «Et la tient au bec et la baisse». (Roman de la Rose, v. 10217). Bec est d'origine celtique.

   BER. Berceau. L'un est le diminutif de l'autre. Mot d'origine maritime.
   Un proverbe populaire en France dit que: Ce qu'on apprend au ber dure jusqu'aux vers. «Autour des bers les anciennes races / Des Corybans, bien armés de cuirasses». (RONSARD, La Franciade, liv. II). Ber est un terme de marine. On trouve aussi le mot épelé bers: «D'un oeil vigilant, en l'antre dictéen / Gardaient le bers du grand saturnéen». (RONSARD).

   BERBIS. Brebis. Formé directement du bas latin vervicem ou vervecem. C'est du très bon vieux français. L'Académie, qui donne brebis, a cependant berger, bergerie, bercail.
   On trouve fréquemment le mot dans saint Bernard: «Etrangle mouton et berbis». (Roman de Rou); «Absolon fit tondre ses berbis». ([Les quatre] Livre[s] des rois, p. 165); «Des autres fist tel tuées, / Comme lions fait de berbis». (Dolopathos); «Et des berbix et don mouton». (Roman de la Rose, v. 104081).
   En Acadie, berbis est un mot générique; il désigne l'espèce: Vas chercher les berbis; J'ai vingt berbis à hiverner. En France, c'est plutôt mouton que l'on dit.
   «L'Artois, la Lorraine, la Champagne, pendant des siècles ne connurent pas les moutons, mais seulement les berbis, qui étaient devenues des ouailles, au temps de La Fontaine, ayant, à la même époque, cessé d'être des ouilles sur les rives de l'Yonne et des berbitz dans le Limousin».

   BERÇANTE (Chaise). Ce que l'on appelle une berceuse en France. Le terme est canadien. Nous disons chaise à roulettes en Acadie.




Source : POIRIER, Pascal. Le Glossaire acadien, édition critique établie par Pierre M. Gérin, Moncton, Éditions d'Acadie; Moncton, Centre d'études acadiennes, 1993, 500 p.