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BRAILLEUX
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BRAYER

Cele qui brait et crie et brailles».
   Braille, ici, paraît avoir le sens de pleurer. Crie, qui le précède, signifiait aussi dans la vieille langue et signifie encore aujourd'hui en Acadie, pleurer, d'où l'anglais to cry. Brailler est plus fort que crier: «Je me contente de gémir sans brailler». (MONTAIGNE); «Quand li enfant aux Sarrazins braioient, les femmes les escrioient: Taisez-vous, vez-ci le roy Ricart (Richard)». (JOINVILLE); «Jusqu'à ce que vous nous les ayez rendues (nos cloches) nous cesserons de crier après vous, comme aveugle qui a perdu son bâton, de brailler comme un âne sans croupière». (RABELAIS).
   Brailler ici signifie vociférer, braire.

   BRAILLEUX, BRAILLOUX. Qui braille ou qui pleure; pleurnicheur.

   BRAISIER. Brasier. Formé régulièrement sur braise. Brasier postule brase, mot étranger à la langue.
   On trouve braisier dans Oudin, Cotgrave, etc.

   BRANCHE. Succursale. Le mot est admis par Littré, Bescherelle, etc., quoique l'Académie ait refusé jusqu'ici de l'enregistrer. Très en usage au Canada: La Banque Nationale a ouvert une branche à Ottawa.

   BRANGEOLER. Chanceler. C'est un verbe inchoatif. Commencer à branler.

   BRANLI. Adv. Tout d'une pièce: soulever de terre un poids branli; le lever branli; «Ils ant des chemins branlis», dit un paysan dans [Dom Juan ou] le Festin de pierre de Molière. On entend brandif en Anjou: Il l'a enlevé tout brandif.
   On a dit en France, peut-être le dit-on encore aujourd'hui, brandi: «Il le porta tout brandi, comme on dit à Paris, sur le lit que faisait la servante». (SCARRON, [Le] Roman comique, II, chap. 7).
   BRAQUER (Se). Ce mot reçoit, ici, plusieurs acceptions qu'on ne lui trouve pas à l'Académie. Il se prend en mauvaise part dans: Où te braques-tu là?; Voyez donc où il se braque!; Il s'est braqué dans une folle entreprise; Où s'est-il braqué?
   Se braquer sur quelqu'un, c'est se diriger, se lancer sur lui.
   Aux Îles-Madeleine, il se conjugue avec avoir et signifie s'en aller: Aussitôt levé de table, j'ai braqué.
   À la [en] Nouvelle-Écosse, braquer son ouvrage, c'est le commencer. En anglais to broach.

   BRAS (d'escalier). Rampe, main-courante.
   Ce sens est apparemment emprunté à la marine, où l'ont dit: le bras d'un aviron; le bras d'une vergue.
   L'Académie donne: des bras de cheminée.

   BRASSAYER. Dans la langue de nos pêcheurs, c'est transporter à bras: brassayer la morue.

   BRASSÉE. Nous disons: Il y en a à brassée pour en grande abondance. Transporter des objets à brassée, c'est les porter à bras, à charge de bras.

   BRAYAGE. Action de brayer (broyer) du chanvre.

   BRAYE. Broie: «La braye est un instrument composé de deux bois retenus par une de leurs extrémités, et s'enclavant l'un dans l'autre à la manière d'une mortaise». (CASGRAIN, [Légendes canadiennes], La Jongleuse). G. Sand, dans la Mare au diable, écrit broys, en soulignant le mot.

   BRAYER. Rompre le chanvre et commencer la séparation de la filasse d'avec le chènevotte; broyer.
   On dit, au Canada, d'une jeune fille qui n'a pas reçu de visiteur le dimanche, qu'elle a broyé.




Source : POIRIER, Pascal. Le Glossaire acadien, édition critique établie par Pierre M. Gérin, Moncton, Éditions d'Acadie; Moncton, Centre d'études acadiennes, 1993, 500 p.