page



CARRÉ
- 95 -
CASSEAU

   CARRÉ. Un carré à foin, chez nous, est ce que les Canadiens appellent une tasserie; un fenil, en France. Le mot tasserie est dans Maria Chapdelaine.
   Nous disons aussi: Nous sommes carrés, pour nous sommes quittes, mais ceci est un anglicisme de sens formé sur le mot square.

   CARREAUTÉ. Quadrillé, barré: de l'étoffe carreautée.

   CARRER (Se). Prendre ses aises sans se gêner: se carrer dans un fauteuil; se carrer pendant que les autres travaillent. Aussi, se donner de l'importance, faire le glorieux: Voyez-le se carrer.
   J'ai lu dans un vieil auteur: «Il se carroit comme un pourceau de trois blancs qui a mangé pour un Carolus de son»; «Je trouvais ses souliers tellement beaux que je m'en carrais». (LE ROY, Jacquou le croquant).

   CARRIOLE. Voiture fine d'hiver servant aux personnes. La voiture dont on se sert pour porter fardeaux et charges s'appelle la traîne: monter en carriole; faire un tour de carriole.
   C'est un diminutif de char; car en anglais. On trouve chariole en vieux français.
   En Normandie, la carriole est une voiture d'été montée sur des roues. La nôtre est sur patins.

   CARRIOLÉE. Le contenu d'une carriole; ce qu'une carriole peut contenir de personnes.

   CASPAREAU ou GASPAROT. L'un et l'autre mot se disent selon les localités, le c et le g se permutant. Sorte de hareng.

   CASQUE. Coiffure d'hiver. Prononcé casse, ce qui est conforme au primitif latin cassis, auquel Ménage rapporte le mot. Il est vrai que Diez, dont l'autorité est très grande le fait venir de l'espagnol casco, crâne. Le
casque était une armure défensive, couvrant la tête, avant de devenir un bonnet de poil. C'était aussi un terme de blason qui ne se distinguait guère du heaume. On a dit heaume, d'abord, puis casque en langage héraldique. Grandeur et décadence!
   Le casque était devenu une coiffure de femme, en France, au temps de l'établissement de l'Acadie, comme le prouve le passage d'une lettre de Mme de Sévigné: «Plus de coiffures élevées jusqu'aux nues, plus de casques».

   CASSABLE. Qui peut être cassé, fragile.

   CASSEAU ou CASSOT. Boîte en écorce de bouleau servant surtout à recueillir l'eau des érables que l'on coche au printemps, pour en faire du tamarin et du sucre. Peut aussi servir à d'autres fins, par exemple, à ramasser des fraises et autres grainages.
   Casseau, diminutif de casse (d'où casserole), est un de ces mots que l'on trouve à l'origine du parler gaulois et dont la racine remonte au haut allemand.
   Une casse, en picard, est un verre à boire.
   Dans le centre de la France, le mot se dit pour lèchefrite, chaudière, chaudron, ce qui fait que casserole et casse sont très apparentés; on peut même les soupçonner d'être un seul et même mot, le premier étant une sorte de diminutif du second. On pourrait peut-être trouver quelque rapprochement entre casseau et kas, que je relève au chapitre CCLXII de Froissart intitulé: «Comment le duc de Normandie fit faire quatre grands kas sur quatre grands nefs pour assaillir Aiguillon».
      Nos Micmacs connaissaient le casseau, mais l'appelaient ouragan, comme en fait foi ce passage de Dièreville (p. 88): «On fit servir ce ragoutant potage dans divers plats d'étain, ou bien dans des ouragans, ou plats d'écorce à l'usage des Sauvages».




Source : POIRIER, Pascal. Le Glossaire acadien, édition critique établie par Pierre M. Gérin, Moncton, Éditions d'Acadie; Moncton, Centre d'études acadiennes, 1993, 500 p.