page



COURIR
- 125 -
COUTRILLE

   COURIR. Fait couri au prétérit, au lieu de couru. C'est ainsi que l'on conjuguait dans l'ancienne langue: Je couris le chercher. Courir vient de currire, et courre, faire la chasse à courre, de currere.
   Courir sur la soixantaine, c'est approcher de soixante ans.

   COURSER. Courser les filles, à l'Île- du-Prince-Édouard, comporte le même sens que galoper les filles; au Nouveau-Brunswick: c'est courir, courailler après elles.
   On a dit dans l'ancienne langue: courser une personne, pour courir après elle. On trouve courser avec le sens de courrousser dans le Mystère du Vieil Testament.

   COUSIN MEDGERMAIN ou METGERMAIN. On dit cousin né de germain en bas de Québec.
   «Des arrière-cousins remués de germains». (REGNARD, [Le] Légataire universel, acte I, scène I).

   COUTANGE. Frais, dépense. On entend encore le mot dans plusieurs départements et le rencontre souvent dans l'ancienne langue: «Et pour monstrer le coutaige que le Roys i mist». (JOINVILLE); «Un autre de sildre nouveau. On vous emplira sans coustage». (Vaudevires); «Les coustages et dommagez qu'il avoit faitz»;. (La Fille du comte de Pontieu); «Il devrait mettre le chastel de Charbourg entre les mains du roy d'Angleterre, qui le devroit à ses coustages faire garder trois ans». (FROISSART); «C'est contraire à la nature de se tourmenter le corps et de mespriser les choses qui sont de peu de coustage». (MALHERBE, Épître 5).
   Les Normands disent coutage; les Champenois, les Picards, les Berrichons, coutance; «Il le trouva de trop grande coutance». (SAND, [François] le Champi). Les Canadiens disent coutange. On trouve aussi coustenghe en très vieux français. Ces formes différentes du même mot se
rapprochent toutes de coût, en anglais cost, et ont le même radical.

   COUTEAU DALLÉ ou DOLLÉ. J'ai entendu l'un et l'autre. C'est un gros couteau à lame recourbée, à la manière d'un cimeterre, et dont on se sert en le tirant à soi pour faire des manches de hache, des douelles de baril et pour découper toute surface incurvée.
   Dallé semble formé sur dail, ou dalh, ou dai, en basse latinité dayla, signifiant faux. Dail se dit encore pour faux, à Genève, et dailli dans le département de l'Isère: «Jaiguisais mon dail en sifflant ma chanson». (LE ROY, Jacquou le croquant). «La mort avec son dail l'eust fauche». (RABELAIS, IV, Nouveau prologue).
   Mais la courbe du taillant du dail ou de la faux est concave tandis que celle de notre couteau dollé, convexe. Ceci soulève une objection étymologique sérieuse, surtout à cause des mots doler, doloire et douille, auxquels on peut aussi rattacher dollé. Doler, du latin dolare, c'est dégrossir à la dolaire, et la dolaire est une sorte d'herminette à l'usage des tonneliers. C'est à l'un de ces deux radicaux, le second il me semble, qu'il faut rattacher le terme acadien.
   «Ce que je me suis meslé d'achever quelque vieux pan de mur et de venger quelque pièce de bastiment mal dolé». (MONTAIGNE). Couteau démanche, c'est apparemment la contraction de couteau à deux manches.

   COUTELIER. Espèce de mollusque bivalve, allongé en forme de manche de couteau ou plutôt en manche de rasoir. Solen ensis. «Combien que j'ai trouvé des coquilles pétrifiées d'alles..., couteleux, pétoncles, chastaignes de mer». (Palissy, Disc. admir. des Pierres, p. 280, rapporté par E. Huguet).

   COUTRILLE. Vieux couteau de table.
   On dit goudrille, dans le même sens,




Source : POIRIER, Pascal. Le Glossaire acadien, édition critique établie par Pierre M. Gérin, Moncton, Éditions d'Acadie; Moncton, Centre d'études acadiennes, 1993, 500 p.