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DEMPUIS
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DÉPEINDRE

universel: Pour un rien il se démonte; Ne te démonte pas comme cela; Le voilà tout démonté; «Lors se plaint à Dieu et se démonte. / De la mort qui si le tourmente». (Roman de la Rose).

   DEMPUIS. Depuis. Depuis est le terme officiel parce que l'Académie l'a consacré, mais dempuis, despuis, dampuis, depis, dempis sont les premières formes de ce mot. Il y avait aussi du depuis. Nous n'avons pas du depuis, mais nous avons du meshui, qui y correspond: Je ne l'ai pas vu dempuis hier.
   Nous disons aussi depuis ou depis quand le mot termine la phrase: Il est venu l'année dernière, mais pas depuis ou depis; «Ignia pas jusquaux souliers qui ne soyent tout farcis (de rubans) depis un bout à l'autre». (MOLIÈRE, Dom Juan); «Nous fumes au dit hable (havre) dempuis le dit jour jusques au dimanche». (Jacques Cartier par Lescarbot); «Dempuis le soir jusqu'au matin». (Ch. PAILLOT, Dialogue en langue du Bas-Poitou). En roman, dendespey, ce qui correspond à du depuis. Jacques Cartier emploie aussi l'expression dans le sens d'après que: «Dempuis que le mari est mort, jamais les femmes (sauvages) ne se marient». (2e Voyage, 1535).

   DÉNIGER. Dénicher. Déniger un nid, pour les enfants, c'est plutôt le piller, en enlever les oeufs: «Cet âge est sans pitié, dénigeant des passereaux, prenant des cailles, grenouilles et escrevisses». (RABELAIS, Pantagruel). Rabelais dit encore: «Lucifer vauldra déniger des cieulx tous les dieux»; «Combattre les Dieux et du ciel les déniger». (Pantagruel). Radical: nid.

   DÉNOUABLE. Qui peut se dénouer.

   DENTER. Mettre des dents, des allochons (alluchons) à une roue.

   DENTU. Qui a des dents. Ce mot a été employé par Victor Hugo.
   DÉPAREILLÉ. Chez les Canadiens, dépareillé s'entend pour sanspareil: Il est dépareillé, il n'a pas son pareil. Appareiller s'est dit, en vieux français, pour être comparable, se rendre pareil: «Lors te viendra en remembrance. / Et la façon et la semblance. / A qui nulle ne s'appareille». (Roman de la Rose). L'ancienne langue avait aussi dépareil, pour qui n'est pas pareil. Littré observe que c'est «un vieux mot bon à reprendre».

   DÉPARER. Nous donnons à ce verbe un sens particulier que je n'ai trouvé nulle part, en dehors de l'Acadie: celui de dépasser, de déboucher: Il a déparé la pointe; Sa goélette a déparé les basses du large; Il commence à déparer. C'est évidemment un terme marin ou, en tout cas, une acception maritime.

   DÉPARLER. Déraisonner, divaguer. On dit d'un mourant qu'il déparle quand il commence à perdre la raison: La fièvre fait déparler un malade; Un homme ivre déparle. Le mot s'est conservé en France, notamment du côté de la Belgique. En vieux français, déparler s'est dit pour cesser de parler, et aussi pour mal parler: «Si fu moult diffamés et désparlés de ses gens meismes de cette aventure». (FROISSART, Chroniques). Nous trouvons dans l'ancienne langue: emparler, mesparler, porparler, contreparler.

   DÉPÊCHER (Se). Se hâter, faire diligence. Les écrivains n'emploient guère ce mot dans ce sens aujourd'hui. Nous ne lui en connaissons pas d'autre: «Il se sont dépêchés de rompre avant que de mourir». (LA BRUYÈRE).

   DÉPEIGNÉ. Non peigné; emmêlé: Mes cheveux sont dépeignés.

   DÉPEINDRE. Peindre. Se dit au propre: Ce portrait-là est bien dépeindu (dépeint). Ce mot n'est em-




Source : POIRIER, Pascal. Le Glossaire acadien, édition critique établie par Pierre M. Gérin, Moncton, Éditions d'Acadie; Moncton, Centre d'études acadiennes, 1993, 500 p.