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DÉSENVELOPPER
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DÉTRIER

   DÉSENVELOPPER. Découvrir; tirer d'une enveloppe: Désenvelopper un paquet (enlever le bandage) est fort en usage dans le centre de la France.

   DÉSENVOÛTER. Enlever un sort, délivrer d'un envoûtement.

   DÉSERT. Défrichement en forêt. Faire un désert, c'est abattre le bois debout et mettre un terrain en état de culture. Sagard dit qu'autour de la maison de Hébert (à Québec), «il y avait un grand désert».
   Être dans le désert, c'est être en un lieu habité, par opposition à être dans le bois, en forêt. On trouve désert pour lieu défriché, dans la vieille langue.

   DES FOIS. Quelquefois, parfois.

   DÉSOUBLIER. Oublier. On trouve le mot dans la vieille langue.

   DESSEIN. Un sans dessein: Qui n'a pas d'initiative, de décision, de volonté. L'expression est plutôt canadienne.

   DÉSSOLER. Enlever le solage, les fondations: déssoler une maison.

   DESSOUS (En). Être en dessous dans ses affaires, c'est s'enfoncer, aller à la ruine. Nous l'employons encore, mais rarement comme préposition: Il est dessous la table.
   S'employait, dans l'ancienne langue, aussi bien comme préposition que comme adverbe: «dessous un pin». (Chanson de Roland); «Le lièvre était gîté dessous un maître chêne». (LA FONTAINE).

   DÉTAMER. Perdre son étamage: un miroir détamé.

   DÉTELER. Au figuré, cesser de travailler: Il a dételé de bonne heure.
   S'emploie absolument: Allez dételer, pour, allez dételer votre cheval.

   DÉTOUR. Tirer des détours, c'est faire des mots d'esprits. Se dit aussi
pour occasion, comme dans cette phrase: À quelque détour, j'irai vous voir.

   DÉTOURNER. Tourner, revirer la terre: «Un jour un coq détourna / Une perle qu'il donna / Au beau premier lapidaire». (LA FONTAINE, [Fables], Le Coq et la Perle).

   DÉTRIER. Sevrer. Se dit des personnes et des animaux; on détrie un enfant et on détrie un veau.
   Quel est le radical de ce mot? Le champ est ouvert aux conjectures.
   Froissart l'emploie tantôt dans le sens de différer, remettre à plus tard: «De quoi il chancela et détria»; tantôt dans celui de décourager, dissuader: «Les descriptions que le Roi de Cicile en faisait détrioit grandement plusieurs seigneurs du dit royaume». Ailleurs il écrit: «Le sire de Clisson... y mettoit grand détry». Ici, détry signifie délai, retard.
   [Guillaume de] Machault dit «sans détrier» pour sans manquer, sans être infidèle et aussi détraire, détrier pour écarter, enlever.
   En picard, détrier veut dire refuser.
   Le v[ieux] fr[ançais] avait trayer en sus pour se retirer, s'éloigner.
   Enfin, on trouve dans Bouchet, cité par Verrier [et Onillon] (Glossaire [des patois et des parlers] de l'Anjou) détrier dans le sens de sevrer, qu'il a chez les Acadiens: «Les Juifs et les Romains ne les sevraient, ne détriaient qu'ils n'eussent trois ans». Trier se dit pour sevrer dans certaines provinces de l'ouest de la France, ce qui semble démontrer que détrier a été formé directement sur trier.
   Que peut-on conclure de tout ceci étymologiquement? Rien de très précis. Il peut se faire que trier ait le même radical que tirer auquel se rattachent tireur, tirage, tiret, tiroir, détirer, étirer, soutirer, et que cette série de vocables provienne du latin distrieare, forme populaire d'extricare.
   Nous donnons à tirer le sens de traire: tirer une vache, et à détrier celui de sevrer, ou cesser de traire ou de




Source : POIRIER, Pascal. Le Glossaire acadien, édition critique établie par Pierre M. Gérin, Moncton, Éditions d'Acadie; Moncton, Centre d'études acadiennes, 1993, 500 p.