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E

   E. Il sera parlé plus loin de la métathèse de cette voyelle devant la consonne r. Nous faisons souvent la métathèse du e.

   EAU. Faire de l'eau, gâter de l'eau se dit pour uriner.

   ÉBAROUIR. Un baril, un fût est ébaroui lorsque, pour avoir été exposé au soleil ou à la chaleur, les douves (douelles en Acadie) se sont contractées et qu'il n'est plus étanche. L'expression est bien connue en France.
   Au figuré, avoir la tête ébarouie, c'est avoir juste assez d'idée pour se conduire.
   Le vieux français avait brouir pour se dessécher. Peut-être y a-t-il quelque rapport entre les deux mots.
   Littré veut que brouir soit un terme maritime.

   ÉBAVAGE. Action d'ébaver.

   ÉBAVER. Enlever l'angle saillant d'un objet. To bevel en anglais. Les deux mots ont la même origine. Ébaver un fossé, c'est enlever le rebord.
   Le mot doit exister quelque part en France, mais il m'a été impossible de le retracer ni dans les parlers dialectaux, ni dans les écritures.
   Godefroy donne bever pour biaiser, et Furetière, bouer.
   Ces trois mots semblent apparentés.
   Je crois qu'on peut leur adjoindre bavelle, en bavelle qui, d'après le [Bulletin du] parler français [au Canada] (oct. 1914, p. 75), se dit à Québec pour «en biseau, manière de polir et de façonner les bords de la semelle et du talon en goudrier». On trouve en belif, dans la vieille langue pour en biais comme nous disons.
   Le mot roman embevemen, élision, doit avoir la même origine. On dit ébalvereté pour décolleté, en Anjou.

   ÉBAVURE. Chose ébavée, chanfrein.

   ÉBEURRER. Enlever le beurre qui se forme sur le petit-lait baratté.

   ÉBOUILLANTER. Échauder, infuser: ébouillanter du thé. S'ébouillanter: s'échauder avec de l'eau bouillante. Ce mot manque à la langue officielle.

   ÉBOURIFLÉ. Autre manière de prononcer le mot ébouriffé. Avoir les cheveux en désordre.

   ÉCALE. Nous disons indifféremment écale ou écaille, comme on le disait dans la vieille langue. Écale s'applique plutôt, chez nous, à la coque des noix et des oeufs, et écaille aux poissons. On a dit de même, métal et métail en France, aux origines de la langue.
   «On ne doit pas selon l'escaille juger li quels moyens vaut mieux». (La Mort Jubin, 11); «Allons pescher des huytres en escalie». (RABELAIS, Pantagruel).
   Quand il s'agit de coquillage, nous disons plutôt comme à l'Académie, coquille: des coquilles d'huîtres.
   Cotgrave note escale et écaille comme synonymes.
   On disait écale ou escale de noix dans la vieille langue.
   Mot d'origine germanique; en anglais, shale.

   ÉCALVENTRÉ. Débraillé, époitraillé, époitriné. S'applique aux hommes aussi bien qu'aux femmes.




Source : POIRIER, Pascal. Le Glossaire acadien, édition critique établie par Pierre M. Gérin, Moncton, Éditions d'Acadie; Moncton, Centre d'études acadiennes, 1993, 500 p.