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FORNIR
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FOURCHÉE

(MONTAIGNE). Brantôme également écrit formiller.

   FORNIR. Fournir. On disait fornir et non fournir à l'origine de la langue: «Ceste besogne sera pour moi fornie». (Ronc[evaux], p. 15); «Quant Renart l'ot, si ot grant joie, / Ne set s'il fornira la voie». (Roman de Renart, v. 11162).
   On dit encore fornir dans le Berri et au sud de la France.

   FORT. Nous entendons les locutions suivantes:
   Il est fort pour se moquer du monde: il est porté à...; Il est fort sur le violon: il joue bien du violon; Ça goûte le fort: le rance; parler fort: sur un ton élevé, avec une grosse voix; le plus fort du temps: la plus grande partie du temps; le plus fort de l'ouvrage est fait: la plus grande partie, la plus difficile...
   Toutes ces expressions, je crois, se retrouvent en France dans le parler dialectal.

   FORTEMENT. Nous disons: J'en ai fortement, pour j'en ai beaucoup; Tu m'as servi fortement de viande pour un peu trop.

   FOUDROYER. (Prononcé foudreyé). La neige foudroye. Les Canadiens disent: poudroyer. Froissart disait comme nous: «En cheminant et allant, ils abattoient et foudroyoient ainsi que une tempeste, maisons de avocats de procureurs de la cour, du Roi et de l'archevèque».

   FOUILLEUX. Tour d'ongle, panaris.

   FOUILLONS. Chairs mortes qui poussent sous les ongles des doigts et qui causent, en grossissant, d'atroces souffrances. Entendu aux Îles-Madeleine.

   FOUINE. Par extension, personne élancée.
   La fouine, sorte de trident, s'appelle ici communément nigogue. Nigogue est un mot micmaque [micmac].

   FOULÉ. Plein, rempli: Y avait-il beaucoup de monde à l'assemblée? — La salle était foulée; L'église était foulée de monde dimanche dernier.
   Il y a deux origines distinctes du mot foulé. Fouler, écraser sous les pieds, dérive du latin populaire fullare. Dans le sens de plein, rempli, foulé se rattache à foule et appartient au radical teuton ou scandinave qui a donné full à la langue anglaise.

   FOULER. Fouler de l'étoffe, c'est la passer au fouloir, au moulin à foulon.
   Cette étoffe foule: se rapetisse après un lavage. Nous disons, comme en France, de l'étoffe foulée.
   Mais nous disons aussi: fouler un sac, un baril, pour le tasser, le bien emplir. Le radical de fouler, pris dans ce sens, se rattache à l'anglais full (prononcé foule) plein, rempli.

   FOULERIE. «Il y avait une foulerie, jeudi, chez Laurent LeBlanc». D'un correspondant au journal l'Évangéline, écrivant de Grand-Étang, Cap-Breton, Nouvelle-Écosse (déc. 1930).

   FOULEUX. (Pour fouleur). Celui qui reçoit avec une fourche et dispose le foin sur une charrette quand on la charge.

   FOURCHE. Fourche de l'estomac; le bas de l'estomac; le solar plexus des boxeurs.
   Je trouve le mot dans la Chirurgie de Mondeville. Il a cours dans tout le centre de la France.
   Fourche de chemins: bifurcation de deux ou de plusieurs chemins. Ou simplement fourche: la fourche du norois.

   FOURCHÉE. Quantité de foin ou de paille qu'on peut prendre et enlever avec une fourche: une fourchée de foin.




Source : POIRIER, Pascal. Le Glossaire acadien, édition critique établie par Pierre M. Gérin, Moncton, Éditions d'Acadie; Moncton, Centre d'études acadiennes, 1993, 500 p.