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NONANTE
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NOTE

om, hom, hum. Ce pronom indéfini, sous toutes ses formes, vient de homs, un homme. Les Anglais en ont fait one, qu'ils ont confondu avec l'adjectif numéral one: One says, un homme dit; one thinks; un homme pense; en français, on pense, on dit.
   Cet l étant adventice, autant vaut n'on que l'on, ou encore t', que l'on trouve dans l'ancienne langue.
   Cet n substitué à l est d'importation française; nous ne l'avons pas inventé: «Faitez au gibet mener, et que n'on les y encoroue». (OLIVIER ASSELIN, Chanson patriotique).
   Num était l'un des pronoms indéfinis de l'ancienne langue, à côté de ço: Ço dit. Num ressemble beaucoup à n'on.
   N'on pour l'on s'entend encore aujourd'hui dans le centre de la France, notamment en Anjou.

   NONANTE. Dans certaines familles acadiennes, chez les d'Entremont du sud de la Nouvelle-Écosse entre autres, la computation des années se fait par dizaine: septante, octante, nonante, de la même manière qu'elle se faisait chez les Celtes, nos premiers aïeux. En France, jusqu'au XVIIe siècle, on multipliait par vingt: trois-vingts, six-vingts comme nous faisons encore pour quatre-vingts.
   L'Académie dit que nonante a vieilli en France. Ici, il a presque complètement disparu.

   NONGLÉE. Onglée. Avoir nonglée aux doigts, c'est ressentir à l'extrémité des doigts une vive douleur occasionnée par le froid.
   Nonglée, c'est la lettre n agglutinée à onglée. L'on dit l'onglée en France. Retranchez l'apostrophe et vous aurez longlée.
   Aux Îles-Madeleine, on a fait un verbe avec nonglée et l'on dit: Je nongle des doigts.

   NORDÊT. Nord-est.
   NORÉ. Nom propre: Honoré. Nous disons de même Norine pour Honorine.

   NOROI. Nord-ouest, l'opposé du suête (sud-est).
   Les Norois étaient, pour les anciens Français, les Norvégiens, les gens venus du nord-ouest ou du noroi, c.-à-d., de la Norvège: «Cette terre est située à Suest et Noroüest». (LESCARBOT), prononcé suêt et norouâ; «Quand le vent ouest et norouest commence à enfler les voiles». (Pantagruel).
   Les anciens prononçaient comme nous; c'est la graphie qui a défiguré les mots noroi, nordêt. La Curne [de Sainte-Palaye] rapporte ceci: «S. Pierre, pêchant avec S. André, et la pêche étant nulle, lui dit: Si le vent tourne de nordeth ou de sehu sud, frère, nous aurons du poisson plus que ne sçaurions».

   NOTE. Savoir la note, c'est savoir déchiffrer le plain-chant assez bien pour chanter au lutrin.
   Il connaît la note veut dire, il peut lire la musique, l'annotation du plain-chant.
   On a dit: messe à note en France pour messe solennelle, grand-messe; et messe sans note, pour basse messe: «... Deux chapelains qui disoient matines à notte et messe à notte». (LA TOUR).
   Dante (Le Paradis, chant XXVIIIe) donne à note à peu près le sens que nous lui donnons.
   «Li gouvernemenz de sa terre fu teir (tel) que touz les jours il ooit (entendait) à note (avec chant) ses heures». (JOINVILLE, [Histoire de] Saint Louis); «Icelle est très mignote / Note / Qu'Amours fait savoir». (Ancienne chanson). «Molt sot de lais et de note». (Roman de Brut); «L'un brait, l'un chante et l'autre note (fait de la musique)». (DESCHAMPS, [Poèmes, «Le] Miroir de mariage»).




Source : POIRIER, Pascal. Le Glossaire acadien, édition critique établie par Pierre M. Gérin, Moncton, Éditions d'Acadie; Moncton, Centre d'études acadiennes, 1993, 500 p.