Je me suis proposé d'en faire vos retraites». L'influence du picard et du normand, qui est très marquée dans la prononciation canadienne, l'est à un bien moindre degré en Acadie. Je ne connais que froid, qui se prononce fret, en faisant sonner le t. -OIR. La finale en -oir des substantifs se prononce -oué en Acadie: mouchoué, miroué, rasoué, battoué, dressoué, dividoué, entonnoué, reposoué, tiroué pour mouchoir, miroir, rasoir, battoir, etc. Ces mots s'orthographiaient mouchouer, mirrouer, rasouer dans l'ancienne langue, mais se prononçaient comme nous les prononçons: «Il nous conduit dans un grand et délicieux réfectouer». (Pantagruel). Prononcé réfectoué. Il y a quelques exceptions: noir, par exemple, qui se prononce nouère. L'infinitif des verbes en -oir: voir, vouloir, pouvoir, apercevoir, etc., se prononce ici vouère, voulouère, pouvoère, apercevouère. Telle était aussi l'antique prononciation: «J'en forge et lui en vais faire / Pour avoir la manière / De faire tirer à boire / De mon tonneau». (BASSELIN, Vaudevires). Chez d'autres poètes on trouve écritoire rimant avec colère. L'infinitif -oir a été précédé, en France, par -eir, qui fut la forme intermédiaire.
ON. Pronom indéfini, dont le radical est homo, homme. On est au cas sujet, homme au cas régime: hominen. On est toujours le sujet du verbe, jamais son régime. On est un pronom indéfini à l'Académie, comme il l'est ici; la différence est que nous lui donnons beaucoup plus d'emplois. Les auteurs écrivent: On vient; on prétend; on était plus heureux sous les rois qu'en République, et nous le disons comme eux, mais ils ne disent pas comme nous: On est venu vous voir pour nous sommes venus.
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Dans la plupart des langues du nord de l'Europe (en danois, en suédois, en allemand, en hollandais), homme est un pronom indéfini qui correspond a homines chez les Romains. Les Anglais ont one, qui n'est autre que notre on: «One would imagine», on s'imagine. Victor Hugo donne quelquefois à on l'emploi qu'il a chez les paysans: «On était vaincu par sa conquête». On, c'est Napoléon. «Les Canadiens font un terrible abus du pronom indéfini on, constamment employé pour nous», nous dit M. Barbeau dans son Folklore [canadien-français]. Les Acadiens également, quoique un peu moins. Ils l'emploient rarement pour je, au singulier. Ils ne diront pas: On est venu vous payer la dîme, Monsieur le Curé; mais je suis, ou plutôt, je sus venu. On est venu payer la dîme, veut dire: nous sommes, lorsque plusieurs viennent ensemble. On a presque toujours un sens collectif dans la bouche de nos gens. Les Latins disaient: homines dicunt et non homo dicit pour on dit.
ONDEYER. Ondoyer: «Nul âge ne remembre si grand cressance d'yaue à Paris avoir undayé». (Ch[anson] franç[aise] de Nangis, cité par La Curne [de Sainte-Palaye]); «Le suppliant enfanta d'un fils, lequel, incontinent qu'il fut né, elle print et undéa». (Pris dans Du Cange). Ondeyer est picard.
ONZE. Se prononce comme s'il était écrit honze, avec un h aspiré: Le honze du mois; On était honze à table. Le Dictionnaire de l'Académie (édition 1718) autorise indifféremment le onze du mois et l'onze du mois.
OPIGNON. Opinion. On dit opignon en Normandie; on le disait également dans l'ancien parler de France.
OPPOSER. Empêcher. Nous disons plus souvent imposer dans le
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