page



-OIR
- 328 -
OPPOSER

Je me suis proposé d'en faire vos retraites».
   L'influence du picard et du normand, qui est très marquée dans la prononciation canadienne, l'est à un bien moindre degré en Acadie.
   Je ne connais que froid, qui se prononce fret, en faisant sonner le t.
   -OIR. La finale en -oir des substantifs se prononce -oué en Acadie: mouchoué, miroué, rasoué, battoué, dressoué, dividoué, entonnoué, reposoué, tiroué pour mouchoir, miroir, rasoir, battoir, etc. Ces mots s'orthographiaient mouchouer, mirrouer, rasouer dans l'ancienne langue, mais se prononçaient comme nous les prononçons: «Il nous conduit dans un grand et délicieux réfectouer». (Pantagruel). Prononcé réfectoué.
   Il y a quelques exceptions: noir, par exemple, qui se prononce nouère.
   L'infinitif des verbes en -oir: voir, vouloir, pouvoir, apercevoir, etc., se prononce ici vouère, voulouère, pouvoère, apercevouère. Telle était aussi l'antique prononciation: «J'en forge et lui en vais faire /    Pour avoir la manière / De faire tirer à boire /    De mon tonneau». (BASSELIN, Vaudevires).
   Chez d'autres poètes on trouve écritoire rimant avec colère.
   L'infinitif -oir a été précédé, en France, par -eir, qui fut la forme intermédiaire.

   ON. Pronom indéfini, dont le radical est homo, homme. On est au cas sujet, homme au cas régime: hominen. On est toujours le sujet du verbe, jamais son régime.
   On est un pronom indéfini à l'Académie, comme il l'est ici; la différence est que nous lui donnons beaucoup plus d'emplois. Les auteurs écrivent: On vient; on prétend; on était plus heureux sous les rois qu'en République, et nous le disons comme eux, mais ils ne disent pas comme nous: On est venu vous voir pour nous sommes venus.
   Dans la plupart des langues du nord de l'Europe (en danois, en suédois, en allemand, en hollandais), homme est un pronom indéfini qui correspond a homines chez les Romains. Les Anglais ont one, qui n'est autre que notre on: «One would imagine», on s'imagine.
   Victor Hugo donne quelquefois à on l'emploi qu'il a chez les paysans: «On était vaincu par sa conquête». On, c'est Napoléon.
   «Les Canadiens font un terrible abus du pronom indéfini on, constamment employé pour nous», nous dit M. Barbeau dans son Folklore [canadien-français]. Les Acadiens également, quoique un peu moins. Ils l'emploient rarement pour je, au singulier. Ils ne diront pas: On est venu vous payer la dîme, Monsieur le Curé; mais je suis, ou plutôt, je sus venu. On est venu payer la dîme, veut dire: nous sommes, lorsque plusieurs viennent ensemble. On a presque toujours un sens collectif dans la bouche de nos gens. Les Latins disaient: homines dicunt et non homo dicit pour on dit.

   ONDEYER. Ondoyer: «Nul âge ne remembre si grand cressance d'yaue à Paris avoir undayé». (Ch[anson] franç[aise] de Nangis, cité par La Curne [de Sainte-Palaye]); «Le suppliant enfanta d'un fils, lequel, incontinent qu'il fut né, elle print et undéa». (Pris dans Du Cange).
   Ondeyer est picard.

   ONZE. Se prononce comme s'il était écrit honze, avec un h aspiré: Le honze du mois; On était honze à table.
   Le Dictionnaire de l'Académie (édition 1718) autorise indifféremment le onze du mois et l'onze du mois.

   OPIGNON. Opinion.
   On dit opignon en Normandie; on le disait également dans l'ancien parler de France.

   OPPOSER. Empêcher. Nous disons plus souvent imposer dans le




Source : POIRIER, Pascal. Le Glossaire acadien, édition critique établie par Pierre M. Gérin, Moncton, Éditions d'Acadie; Moncton, Centre d'études acadiennes, 1993, 500 p.