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ORILLER
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OSEAU

jourd'hui, mais orignac, prononcé origna, paraît avoir été la première forme de ce mot.
   Si nous nous en rapportons à Lescarbot, le nom orignac fut donné à l'élan du Canada par les Basques, les premiers à fréquenter les rivages de l'Acadie. Ce mot n'appartient pas aux langues aborigènes d'Amérique. Champlain, qui l'emploie en 1603, quelques années avant Lescarbot, prétend qu'il vient de France.
   Ce mot est si peu français d'origine, que certains auteurs le confondent avec original. Nicolas Denys écrit le mot orignac au singulier, et orignaux au pluriel.
   Le nom abénaquis de l'orignac était moûce, dont les Anglais ont fait moose. Dès 1614, John Smith, dans son Histoire générale, donnant la liste des animaux que l'on rencontrait dans la baie de Penobscot, état du Maine, écrit le mot moos.
   Lescarbot nous dit que les Micmacs l'appelaient aptaptou. Aptaptou est le mâle, le bull-moose. Il n'y a rien d'étonnant à ce que le roi superbe des forêts du Canada eut un nom à soi, différent de celui de la femelle.
   «Richelet dit qu'on écrit orignac et orignal; mais on ne doit point faire sentir le c». (ROSSET). Origna, par conséquent.
   Je cueille ceci d'un journal de Paris, La Croix, si je ne me trompe: «Sans parler des orignals, des cerfs, des mooses»; «Les eslans ou orignats sont en grand nombre au pays des Montaignais». (SAGARD, 750).

   ORILLER. Oreiller. On disait oriller et oreiller indifféremment au XVIIe siècle, en France. La première forme est celle que les Acadiens ont conservée.
   Un oriller de voiture est un coussin de voiture. Il peut se faire que la même expression existe en France. Nous disons également oriller quand le versoir d'une charrue retourne la terre lorsqu'on laboure. L'oreille d'une charrue se dit pour versoir.
   Il y avait en France autrefois le droit
des orillers, qui était le droit à un présent exigé des nouveaux mariés. Ce droit n'existe plus en Acadie, s'il y a jamais existé.

   ORILLON. Oreillon. Enflammation des parotides. L'on dit érupiau aux Îles-Madeleine.

   ORIORTE ou HORIORTE. Hart, branches d'arbrisseau dont on fait des liens.
   On les appelle riottes en Berri, et riortes en d'autres provinces de France, où on les emploient surtout à lier des gerbes de grain. En Acadie, les oriortes servent principalement à lier les piquets de bouchure, lorsqu'ils sont plantés verticalement.
   On les emploie aussi pour corriger les enfants: une bonne volée d'oriortes. Ce qui fait qu'oriorte est apparenté avec horion: «Ses chivaus deyt le chartetier / De sa fouette ou de sa ryote gyer». (Vieille poésie normande).

   ORLER. Ourler. L'un et l'autre s'entendent en Acadie. On disait également orler et ourler dans l'ancienne langue: «Si estoit au col bien orlée / D'une bende d'or néelée». (Rom[an] de la Rose, v. 1069).

   ORLET. Ourlet. Diminutif de l'ancien français orle. Du latin orula.

   ORMIÈRE. Lieu planté d'ormes.

   ORTEIL. Est du genre féminin: Ma petite orteil, ma grosse orteil.

   OSEAU, OUESEAU. Oiseau.
   Louis XV prononçait ouézeau et la cour avec lui.
   Beaume donne oziau qu'il écrit oziax.
   «Primes chaperons à gorge, avecq nos oseaux». (Roman de Jehan de Paris).
   Oseau vient du bas latin aucellus.
   Oiseau, avec un i, pourrait dériver de avicellus.
   C'est de ozeau, et non de oizeau,




Source : POIRIER, Pascal. Le Glossaire acadien, édition critique établie par Pierre M. Gérin, Moncton, Éditions d'Acadie; Moncton, Centre d'études acadiennes, 1993, 500 p.