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OUTER
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OYE! OYE!

écrit: «Outardes et oies sauvages blanches et grises». Les grises pourraient bien être ce que nous appelons cravans et les Anglais brants, les «petites oyes» de Champlain.
   Jean Alphonse, dans son Routier, parle également des «outardes et des oies». On trouve le mot sous la plume de la plupart de ceux qui ont, originairement, décrit le Canada et ses habitants.
   Quant à l'assertion que «l'outarde est bien plutôt un oiseau de rivage qu'une oie», je ne saisis pas exactement ce que le savant ornithologiste entend par ces paroles, mais ce que je puis affirmer, c'est que notre outarde est un oiseau migrateur, capable chaque printemps de monter jusqu'aux régions polaires et de descendre à l'automne jusqu'aux savanes de la Floride. Je conteste, d'autre part, que le nom français qui lui convient le mieux soit «la bernache du Canada». Le nom français qui convient le mieux à notre outarde, c'est outarde. La bernache, pour nous, comme je l'ai dit, c'est le cravan, le brant des Anglais.
   Ce n'est pas seulement au Canada qu'il y a confusion; il paraît y en avoir en France autant qu'ici. Prenons les dictionnaires. Celui de l'Académie définit l'outarde: «Gros oiseau à jambes hautes, dont les pieds n'ont que trois doigts et qui vit ordinairement dans les grandes plaines»; et [le] Littré: «Genre d'oiseaux de l'ordre des échassiers, se rapprochant des autruches par la disposition de leurs pieds
et leur port lourd, mais capables de voler».
   Le nom outarde n'a été inventé ni par les Canadiens, ni par les Acadiens: il nous vient de France. Nous le donnons, non pas a un oiseau qui «vit ordinairement dans les grandes plaines», mais en pleine mer, où il se nourrit d'algues marines. Il est tout à fait «capable de voler». Les Hurons l'appellent ahonque.

   OUTER. Ôter. Chez la presque totalité des écrivains antérieurs au XVIIe siècle, on trouve le mot écrit oster.
   Ronsard va nous dire comment il se prononçait: «Car on ne combat plus pour l'honneur d'une jouste, / D'un prix ou d'un tournoi, mais afin que l'on s'ouste /    L'un à l'autre la vie».

   OUVRABLE. Qu'on peut ouvrir: Cette porte n'est pas ouvrable, à cause de l'humidité.

   OUVRAGE. Subst. fém.: De la belle ouvrage. Le mot était des deux genres en France au XVIe siècle.
   Le temps des ouvrages est le temps des labours du printemps et des semailles.

   OUVRIR. Ouvrir une terre neuve, c'est faire un défrichement sur une terre en bois debout, c.-à-d., boisée.

   OYE! OYE! Exclamation de douleur.




Source : POIRIER, Pascal. Le Glossaire acadien, édition critique établie par Pierre M. Gérin, Moncton, Éditions d'Acadie; Moncton, Centre d'études acadiennes, 1993, 500 p.