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PRÉCIEUX
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PRÉTENDRE

GNÉ, [Les Tragiques], «Misères»); «Dieu vous guard, troupe diaprée, / Des papillons qui par la prée / Les douces herbes suçotez». (RONSARD); «Une fois l'an firent faucher la Prée». (DESCHAMPS); «Heureux vieillard, désormais en ces prées». (MAROT, lère élégie); «L'homme des champs et des prées». ([DU] BELLAY, Ode pastorale).
   Il y avait, peut-être existe-il encore, le Ford-de-la-Prée, dans l'île Saint-Martin[-de-Ré], en face de La Rochelle. C'est de La Rochelle — «la jolie Rochelle» — que beaucoup de colons se sont embarqués pour l'Acadie. Il y a les Mines-de-la-Prée sur la Loire. On trouve encore, en France, la Prée-Vallée. Pierre Loti, dans une lettre, parle de la prée de Rochefort.
   C'est à la Grand-Prée, aujourd'hui Horton, que furent embarqués en 1755, sur des pontons anglo-américains, les Acadiens déportés de la Nouvelle-Écosse, dont le plus grand nombre fut jeté sur les plages inhospitalières de l'Amérique, et d'autres dans les prisons d'Angleterre.

   PRÉCIEUX. Se dit aussi pour important, de conséquence: Faites attention, c'est une boîte précieuse.

   PRÉLART. Natte, grosse toile, tapis grossier, servant à protéger des objets de prix, marchandise ou tapis. C'est un terme plus en usage au Canada qu'en Acadie, où l'on se sert plutôt du mot catalogne.
   On dit aussi, influence analogique, prélat, tant en France qu'ici.

   PREMIER (En). Autrefois: Les choses se passaient autrement, en premier; En premier, les enfants avaient plus de respect pour leurs parents; Je l'ai connu, en premier. Nous disons aussi sur l'en premier (voir empremier). C'est le in principio des Latins.
   On trouve fréquemment du premier, dans la vieille langue, et aussi premier: «Quant au premier la dame que j'adore». (RONSARD, Amours, liv. I); «Et
respont Rosamonde: — Premier le me juris». ([Elie ou Vie de] S[aint]-Gilles, v. 1771). Malherbe ayant déclaré l'expression vieille, elle fut biffée.

   PRENDRE. Voici quelques emplois du verbe prendre qui ont ou qui n'ont pas cours en francais académique: Prendre une chose en mal, en mauvaise part, s'offenser d'un propos en l'interprétant mal; Se prendre, en venir aux coups, se battre: Je me suis pris avec lui; Ils se sont pris; Prendre une terre; s'en faire donner l'octroi par le gouvernement; Prendre serment, prêter serment; Prendre une brosse, s'enivrer. Expressions canadiennes: — Prendre la part de quelqu'un: prendre son parti; Prendre en feu, prendre feu; Prendre pour quelqu'un, prendre son parti; Prendre un magasin, ouvrir boutique; Prendre, au jeu de cartes, enlever la main; «L'hiver, le lac Saint-Jean prend à glace dans toute son étendue». (BUIES, Le Saguenay).

   PRESSE. Urgence, empressement. L'Académie ne définit guère le mot dans ce sens. Nous disons: Il n'y a pas de presse pour ça; Ça ne presse pas. Rien ne presse; Dans ma presse (précipitation) à partir, j'ai oublié mon portefeuille (porte-monnaie); «Imaginez la grand' presse a qui auroit le privilége d'estre porté... sur le poing de chascune». (MONTAIGNE); «Je crois que vous avez trop de presse d'y aller». (SAND, Fr[ançoi]s le Champi); «En ce temps-là, il y avait de la presse à se faire déchirer... pour Jésus-Christ». (BALZAC, les Commencements du christianisme).

   PRÉTENDRE. Nous disons: prétendre de comme Pascal ([Les] Provinciales): «Vous ne prétendez pas, mes frères, de faire accroire au monde ...»; et comme Mme de Sévigné: «Je prétends bien de vous voir». À l'Académie, prétendre est tantôt un verbe actif: prétendre la moitié des profits, prétendre donner la loi partout, ou un verbe neutre suivi de à: préten-




Source : POIRIER, Pascal. Le Glossaire acadien, édition critique établie par Pierre M. Gérin, Moncton, Éditions d'Acadie; Moncton, Centre d'études acadiennes, 1993, 500 p.