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SEREIN
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SI

   SEREIN. Nous disons sur ou plutôt sus le serein pour sur le soir, lorsque le serein tombe: «Quelque fille de roy, allant a l'esbat sus le serein le rencontrera». (Pantagruel).

   SERVICE (De). Ne s'emploie qu'avec la négative: Ce n'est pas de service; Cette voiture n'est pas de service; Mon habit n'est pas de service pour n'est pas en bonne condition, n'est pas mettable; «Une éloquence de service». (BALZAC, La Vraie et la Fausse Éloquence).

   SERVITEUR. Est en usage ici aussi bien qu'il l'était autrefois en France comme terme de salutation. Un nouvel arrivant dira en s'adressant aux personnes présentes: Serviteur, mes amis! (ou plutôt sarviteur; «Voilà mon rôle joué. Serviteur à la compagnie». (MOLIÈRE, La Comtesse d'Escarbagnas, scène IX).
   Quelquefois serviteur est une formule polie de refus, de fin, de non recevoir, comme dans Molière encore: «Ah! Monsieur, serviteur». (Le Dépit amoureux). Et dans La Fontaine ([Fables], La Tête et la Queue du Serpent): «Je suis son humble servante».

   SEUILLET. Diminutif de seuil: le seuillet de la porte.

   SEUL. S'est prononcé seu en Acadie, comme dans ce vers d'Erec et Enide: «Que cil sont trois, et il est seus».
   Le l final est tombé de bonne heure:
«Se parti de nostre ost (armée) touz seus». (JOINVILLE); «Floires revient seus de Montoire». (Floire et Blancheflor); «Cil seus soloit a lui aler / Et son pain et s'eve (eau) aporter». (Partenopeus, cité par G. Fallot). «Ils estoient, je crois, tous deux / En leur chambre enfermés tous seulz». (COQUILLART, Monologue de la Botte de Foing); «Mars va tout seul, les Amours vont tous seuls; / Qui donc voudra ne languir paresseux?» (RONSARD, Amours, liv. I).
   SEUREMENT. Se dit pour seulement, par le changement assez fréquent dans la langue, de l en r et inversement: Il ne m'a seurment pas dit merci.
   C'est la prononciation normande, où l'on dit, pour indiquer un silence absolu: «Il ne m'a pas seurement dit: la pie est nère» (noire).

   SÉVÈRE. Arpenteur (voir sévèrer).

   SÉVÈRER. Arpenter. De l'anglais to survey.
   Durant le régime français en Acadie, il n'y avait pas d'arpenteur officiel. On s'entendait entre voisins pour la division des terres. Les lignes mitoyennes étaient marquées au moyen d'arbres plaqués. Il en était de même du trécarré. Les Anglais eurent des surveyors, to survey the lands. Il fallait désigner ces nouveaux fonctionnaires, jusqu'alors totalement inconnus. De surveyor l'on fit sévère, un sévère, et de to survey, sévèrer. Deux vocables a visage bien français.

   SHELIN. Le sheling [shilling] anglais. Escalin en vieux français.

   SHINTE. Subst. fém. Bordure non labourée dans un champ labouré (voir cheinte).
   Le mot s'entend encore dans le parler dialectal de France.
   René Bazin, dans les Trois Gars de la Hansière, écrit chintre: «Ils étaient étendus sur l'herbe de la chintre»; «Chintre, planche de labour où aboutissent les sillons d'une pièce de terre». (RIVARD, Études [sur les parlers de France au Canada], p. 48).
   D'après La Curne [de Sainte-Palaye] le mot viendrait de ceindre, qui s'est dit chaindre, en France.

   SI, SI SI, SI FAIT. Oui. Nous disons oui pour affirmer, purement et simplement: Avez-vous vu mes vaches dans le bois? — Oui.
   Si s'emploie lorsqu'il y a contradiction, ne fut-ce que dans les termes:




Source : POIRIER, Pascal. Le Glossaire acadien, édition critique établie par Pierre M. Gérin, Moncton, Éditions d'Acadie; Moncton, Centre d'études acadiennes, 1993, 500 p.