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CHAPITRE VII



Port-Royal d'Acadie


Pendant que la langue française est entre les mains des grammairiens, cherchant sa forme définitive, " quelques aventuriers de haut parage, " Biencourt, seigneur de Poutrincourt, baron de Saint-Just, en Champagne et de Monts, sieur de Guast, traversent l'Atlantique et vont fonder Port-Royal, en Acadie. Ils amènent avec eux cent-vingt engagés1 et colons, recrutés, quelques-uns, vraisemblablement, à Paris et à Dieppe, puisque des marchands de ces deux villes s'étaient associés à l'entreprise, mais le plus grand nombre, selon toutes les apparences, en Champagne. Biencourt, qui projetait de se fixer avec sa famille dans le nouvel établissement et d'y fonder une dynastie féodale, dut s'entourer de ses gens, censitaires, ou voisins.
Quel dialecte parlaient Poutrincourt, de Monts et leurs compagnons ? La langue d'oui assurément, l'idiome de la Champagne, dont ils étaient originaires.
Il nous en reste un monument bien précieux dans l'Histoire de la Nouvelle-France, écrite par Lescarbot, historiographe de l'expédition, né à Vervins, aux confins de l'Île-de-France et de la Picardie, l'un des endroits du royaume où se parlait le meilleur français de l'époque.
Son livre, peu connu dans la littérature, mérite de l'être davantage. Au point de vue littéraire, Lescarbot vaut la plupart des prosateurs et des poètes de la Pléiade, farci qu'il est de leur érudition pédantesque2.
Parlant des Souriquois et de leur sagamos, ou grand chef Membertou :

1. – Hommes à gages, en Acadie.
2. – Montaigne n'a pas échappé à cette contagion.




Source : POIRIER, Pascal. Le parler franco-acadien et ses origines, s.n., s.l., 338 p.