Avant de procéder à l'étude particulière du parler acadien, il ne sera peut-être pas sans utilité d'examiner quels étaient, durant la première moitié du XVIIe siècle, à la date de l'établissement de la colonie américaine, les idiomes principaux qui se partageaient la France, leur distribution territoriale, leur importance, et quelle était, en même temps, la situation du tourangeau et du berrichon via-à-vis de ces idiomes.
La langue, au milieu du XVIIe siècle, était toujours divisée, comme elle l'avait été durant six siècles auparavant (et l'on peut ajouter, comme elle l'est aujourd'hui encore), en langue d'oïl et en langue d'oc ; mais la première était devenue, après que se fut effectuée l'unité du royaume, la langue française, et la seconde, celle que parlent aujourd'hui les Félibres
1, était connue sous le nom de langue romane.
La langue d'oc, nous dit Littré, dans la préface de son Dictionnaire (p.
XL VIII), était parlée au delà, et la langue d'oïl, en deçà, de la Loire, avec une zône intermédiaire, placée sur les confins des deux types, " où le parler est mixte et présente des confusions de type. " Il ne nous dit pas quelle est la profondeur de cette zône intermédiaire, ni quels départements elle couvre, en tout ou en partie.
Ampère, d'un autre côté, nous assure que la ligne de démarcation entre les deux idiomes n'est pas la Loire, mais " la corde de l'arc que décrit la Loire et qui s'étend du lac Léman (en Suisse) à l'embouchure de la Sèvre. "
1. – Mistral, poète félibre, c'est-à-dire, provençal, et auteur de Mireille, a reçu, il y a quelques années, le prix Nobel de $40,000, pour l'excellence de ses poésies.
Le provençal est une langue à toutes fins vivante et l'une des plus riches. C'est la langue romane, le français primitif, ou quelque chose s'approchant.