qu'une foule d'autres vocables honnêtes, en usage, depuis le XIIe siècle, et antérieurement même.
Et la langue en demeura appauvrie
1.
De mots populaires, propres à désigner les objets usuels, sans détours ni circonlocutions, il resta ce que de nécessité il resta de manants dans les châteaux des seigneurs, juste ce qu'il fallait pour les bas services
2.
Puis les Quarante firent paraître le
Dictionnaire de l'Académie, qui fut le Bottin de la langue française, blasonnée et fleurdelisée.
Le français de Paris, qui était devenu la langue officielle du royaume, au siècle précédent
3, prend le pas sur toutes les autres langues vivantes, et Louis XIV, au zénith de sa gloire, l'impose aux chancelleries de l'Europe et du monde.
Tous les mots roturiers usités par les poètes et les chroniqueurs de l'ancien idiôme, et mis de côté par Vaugelas, " tyran de la langue " et par les autres architectes du
Dictionnaire, les linguistes, les cherchent aujourd'hui, avidement dans les vieux auteurs et dans les chartes poudreuses. Les écrivains, de leur côté, s'évertuent à les réhabiliter, les mieux conformés, au moins
4.
Il en est d'autres qui n'ont pas eu l'heur d'être couchés dans aucun parchemin, ni de figurer dans aucune charte, ni loi écrite. La plupart de ceux-ci sont perdus à tout jamais. Quelques-uns, cependant, transmis verbalement de père en fils, se perpétuent
1. – " J'ay tousjours regret aux mots et aux termes retranchez de nostre langue, que l'on appauvrit d'autant. " Vaugelas.
2. – Chez les puristes de XVIIe siècle, un mot était réputé vil et roturier "pour ce que la populace en usoit ". Henri Estienne.
3. – Ce n'est qu'au XVIe siècle que la langue française est devenue, si l'on peut dire, la langue légale du royaume, à l'exclusion du latin. L'ordonnance de Villers-Cottercts, rendu en 1539 par François 1er, statue que " tous les arrêts et procédures et autres quelconques actes et exploits de justice ou qui en dépendent soient prononcés, enrigistrés et délivrés aux parties en langage français maternel et non autrement." Le latin, dans les siècles antérieurs, avait été la langue des procédures et des arrêts des tribunaux.
4. – " J'ai tiré de l'enfer tous les vieux mots damnés. "Victor HUGO.