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Ore est bien raison et heure
Que m'i dois retorner " (COUCI) ;
" Il averad (aura) un meis (mois) et un jor de querre li " (pour le quérir). Lois de Guillaume-le-Conquérant ;
" La court ajorne les parties à jor nomé," Assises de Jérusalem.
Au XVIe siècle, la confusion entre o et ou est encore grande dans les oeuvres littéraires. La question flotte. Il arrive même que certains auteurs emploient l'un et l'autre son, dans le même mot, au cours de leurs écrits.
" Ce qui n'est point pour nous étonner, nous dit Th. Ross et, puisque, durant tout le XVIe siècle, la France grammaticale avait été partagée entres les ouistes et les non-ouistes. "
La même confusion existait parmi le peuple. Les Conférences confondent, en plusieurs cas, o et ou.
Depuis l'origine du français comme langue autonome, jusqu'à la classification par l'Académie des o et des ou dans les mots officiels, il serait difficile de dire lequel des deux sons a prévalu.
Avec Rabelais, c'est ou qui le plus souvent l'emporte.
Je trouve dans Pantagruel et dans Gargantua : " Ouestez1 ces vilaines bêtes, " " ung routisseur, " " roustie, " " la fumée du roust " " verollez jusqu'à l'ous, " " Bourdeaulx ", " se pourmenoyt ", " la cocque d'oeuf dont ils furent esclouz ", " passant par l'oer, de peur de la rousée ", " en cest arrest le courbeau fut pelé ", " la réponse vous sera promptement expousée ", " quelle ne penche poinct plus d'ung cousté que d'aultre ", " propous ", " plus toust ", etc.
L'un des principaux personnages du livre se nomme Graudgousier. Montaigne, de son côté, donne la préférence à o, quoiqu'il mette ou dans proufit, arrousée, etc. Montaigne était du Périgord, ce qui peut expliquer la fréquence de o chez lui, tandis que Rabelais, qui était de Chinon, dans le département de l'Indre-et-Loire, aux confins du Berri, emploie ou de préférence. Chacun des deux grands auteurs écrivait plus volontiers selon son dialecte natal. Chez Calvin2, c'est o que nous trouvons le plus souvent.

1. – D'où l'anglais to oust, en Acadie outer.
2. – Né à Noyon, en Picardie.




Source : POIRIER, Pascal. Le parler franco-acadien et ses origines, s.n., s.l., 338 p.