en Acadie, l'on dit encore aujourd'hui, en Belgique gauloise,
loumer et, dans le Hainaut,
lommer, pour
nommer.
N, à son tour, se change, en certains cas, en
1, comme dans
lombril pour
nombril.
Venenum faisait indifféremment
venin et
velin, en vieux français. Saint Bernard nous met en garde contre le "
velin de détraction " et " son
envelimée semence. "
Nous n'avons, en Acadie, ni
venin, ni
velin ; nous employons de préférence le mot poison ; mais nous disons
velimeux. Les Canadiens font une grande consommation du mot
velimeux, prononcé
v'limeux1, comme en France, et qu'ils emploient volontiers en guise de jurement
2.
Des savants se sont demandés s'il y avait eu transition dans l'évolution de l'une de ces deux lettres à l'autre, dans le passage du son entre
1 et
r, par exemple, et inversement entre
r et
1.
" Ce phénomène, nous dit Dauzat, pose encore bien des problèmes. "
Le problème est carrément posé dans le mot
marne, désignant un mélange naturel de calcaire et d'argile. Les différentes formes de ce mot sont une illustration du passage de
r à
1 et même à
n et inversement. Tantôt l'
n tombe et l'
r et l'
l restent, comme dans ce passage de Froissart : " Gravier de blanche
marle ", forme
que les Anglais ont prise des Franco-normands et qu'ils ont conservée ; tantôt l'
r et 1'
l disparaissent 1'un et l'autre : " La
marne, à bon droit appelée, d'aucuns
manne. " (O. de Serres).
A Namur, c'est
maule que l'on dit ; en Haut-Normand, c'est
malle et quelquefois
mâle. En Wallon, les trois consonnes tombent pour laisser
maïe.
J'ai entendu
marle, en Acadie ; mais nos gens disent de préférence :
de la terre grasse.
Je puis rendre témoignage d'un exemple du passage de
r à
1, s'effectuant directement, sans transition, ni intermédiaire.
La consonne
r n'existe pas dans l'alphabet parlé des Algon-
1. – " Vénéneux a été aussi prononcé velimeux par une grnade partie du peuple, " Henri ESTIENNE.
2. – En Bourgogne, l'on dit enverimé, en Picardie, invrimé, et en Provence enverimar. Au lieu d'un n, ou d'un 1, c'est ici un r.