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était la manière de dire, non seulement du centre de la France, et notamment de la Touraine et du Berri, mais aussi de la Normandie, de la banlieue de Paris, et même de la cour. On disait mouchoué, à Blois, l'endroit de France où l'on parlait et prononçait le plus correctement1.
Girouard, nom propre, se prononce Girouère, en Acadie, quoiqu'il conserve, en écriture, l'orthographe que lui ont donnée les missionnaires : Giroir, ou Girroir.
Les finales en oire se prononçaient ouère (wère), aux XVIe et XVIIe siècles, dans la plupart des mots, où, aujourd'hui, la prononciation est conforme à l'orthographe.
Rabelais, contempteur de toute convention gênante, écrit machouère, et Mathurin Regnier, presque son contemporain, fait rimer histoire (prononcez histouère) avec chaire2.
Nous disons machouère, histouère, armouère, etc., comme Rabelais et ses contemporains.

Eur – Eux.

II est facile d'établir, sur les autorités les plus irrécusables, que, dans les suffixes en eur, l'r final tombait, aux XVIe et XVIIe siècles :
Mon bon monsieur (monsieu),
Apprenez que tout flatteur (flatteu)
Vit aux dépens de celui qui l'écoute (LA FONTAINE).
Quelques auteurs vont même jusqu'à supprimer l'r final de ces mots et à le remplacer par un x, comme le fait La Bruyère dans le discours sur Théophraste, datant de la fin du XVIIe siècle, où il écrit querelleux pour querelleur3. " Qu'on me chasse ce grand pleureux ", dit Boileau, Héros de romain ; et Madame de Sévigny : " Vous avez de l'obligation à Langlade ; ce n'est point un écriveux. "

1. – " Il est mal aisé de regarder longuement et avec plaisir la beauté d'un mirouer qu'on ne s'y regarde soi-même " Saint François de Sales. Le saint prononçait-il mirouë, ou mirouère ?
2. – Saint Gelais, autre contemporain, fait rimer paroisse, (parouèce ou parwèce) avec pécheresse, comme nous l'avons vu.
3. – " On écrit avaleu, ou avaleux, chanteux ou chanteu, danseux, denicheux, à Paris ". NISARD.




Source : POIRIER, Pascal. Le parler franco-acadien et ses origines, s.n., s.l., 338 p.