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A l'offertoire, ou à la communion, on chantait un cantique de France, pris parmi les plus beaux : " Qu'ils sont aimés, grand Dieu, vos tabernacles;1 Tout n'est que vanité, mensonge et fragilité2, etc. Durant tout le carême c'était : Au sang qu'un Dieu va répandre3.
La plus haute autorité laïque de toute la paroisse était le marguiller, prononcé mardiyer. Le premier mardiller, – il y en avait trois pour chaque fabrique - gardait l'une des deux clefs du coffre4 ; le prêtre avait l'autre. Ils s'assisaient5 au banc-d'oeuvre, le dimanche, durant les saints offices.
Après les marguillirs, mais bien au-dessous, venaient les syndics6. Il y avait un syndic pour chaque section de la paroisse.
Une bien louable coutume, perdue malheureusement, qui rappelle la multiplication des pains et des poissons sur la montagne, est celle du pain bénit. Le chanteau – nos gens disent château7 - était réservé au prêtre, qui le faisait parvenir, discrètement, à quelque nécessiteux de la paroisse.
Rien de moins puritain que le saint jour du dimanche, parmi les Acadiens ; jour de repos et de prière, cependant. La cueillette8 d'un pauvre, ou d'une veuve, était-elle en perdition, les jeunes gas se réunissaient, le dimanche après-midi, avec la permission du missionnaire, et allaient, parmi les chansons, le

1. – Par Fénélon.
2. – Par Voltaire.
3. – Par Fénélon.
4. – Caisse d'une fabrique.
5. – Pour ils s'esseyaient. Assire est une autre forme du verbe s'asseoir.
La Bruyère dit plus souvent il s'assit que il s'assied. Thomas Corneille aussi emploie le verbe s'assire.
6. – Les syndics étaient quelque chose comme les représentants du suffrage populaire, dans une paroisse.
7. – Certain bedeau de l'île Saint-Jean (aujourd'hui du Prince-Edouard) était soupçonné de le garder pour lui. Quelqu'un l'ayant pris sur le fait, on fit à son sujet une chanson fort spirituelle et maline (féminin de malin) surtout, qui se chante encore.
8. – Récolte.




Source : POIRIER, Pascal. Le parler franco-acadien et ses origines, s.n., s.l., 338 p.