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anglais1, synonyme de pluie. Il y a gros à parier que c'est de rain que grain a été formé, par analogie, irrégulièrement. Un grain de vent, n'a rien de commun avec un grain de céréale, mot formé sur le 1. granum.
Dans la province de Québec, on entend dire : Il est entré comme un rain de vent, pour brusquement, sans se faire annoncer.
Les Acadiens des Iles-Madeleine disent, pour l'avoir entendu dire à leurs ayeux de Grand-Pré et de Beaubassin : une pluie abattante. C'est de pluie abattante que l'Académie a fait pluie d'abat, ou inversement. Descartes nous parle d'un vent d'abat, qu'il orthographie abas. La locution, un abat de pluie, s'entend encore en Normandie.

Charpenterie

Les outils dont on se sert, aujourd'hui, en charpenterie sont tous de fabrication anglaise, ce qui fait que plusieurs portent des noms anglais. La plupart, cependant, sont demeurés français ; un certain nombre conservent les vieux noms, aujourd'hui perdus, qu'ils avaient aux XVIe et XVIIe siècles. De ce nombre sont le couteau dallée, ou dollé2. Il y a aussi le couteau-deux-manches3.
Nous nous servons d'un virebrequin4, quand le terriere5 est

1. – Rain est d'origine essentiellement teutone.
2. – Dallé pourrait aussi bien être daillé ; aille et alle se confondent souvent, dans le parler acadien.
Couteau à lame recourbée, dont on se sert, en le tirant à soi, le poignet tourné en dehors, pour faire des manches de haches, des douelles (douves) etc. Se rattache à dail, nom de la faux, en vieux français, et encore aujourd'hui, à Genève "J'aiguisais mon dail en sifflant ma chanson" Eug. LE ROY, Jacques le Croquant.
3. – Pour à deux manches ; espèce de datif, dont nous avons plusieurs exemples.
4. – Virebrequin pour villebrequin est une déformation analogique. Le mot est d'origine germanique. En Flamand winboreken. Virebrequin en Berry, et en Touraine.
5. – Masculin, en Acadie.




Source : POIRIER, Pascal. Le parler franco-acadien et ses origines, s.n., s.l., 338 p.