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20 LES MUSES

NEPTUNE c'est mon nom, Neptune l'un des Dieux
Qui a plus de pouvoir souz le voute des cieux.

Si l'homme veut avoir une heureuse fortune
Il lui faut implorer le secours de Neptune.
Car celui qui chez soi demeure cazanier
Merite seulement le nom de cuisinier.
Je fay que le Flameng en peu de temps chemine
Aussi-tot que le vent jusques dedans la Chine.
Je fay que l'homme peut, porté dessus mes eaux,
D'un autre pole voir les inconuz flambeaux,
Et les bornes franchir de la Zone torride,
Ou bouïllonnent les flots de l'element liquide.
Sans moy le Roy François d'un superbe elephant
N'eust du Persan receu le present triumphant:
Et encores sans moy onc les François gendarmes
Es terres du Levant n'eussent planté leurs armes.
Sans moy le Portugais hazardeux sur mes flots
Sans renom croupiroit dans ses rives enclos,
Et n'auroit enlevé les beautez de l'Aurore
Que le monde insensé folatrement adore.
Bref sans moy le marchant, pilote, marinier
Seroit en sa maison comme dans un panier
Sans à-peine pouvoir sortir de sa province.
Un Prince ne pourroit secourir l'autre Prince
Que j'auroy separé de mes profondes eaux.
Et toy méme sans moy apres tant d'actes beaux
Que tu as exploités en la Françoise guerre,
N'eusses eu le plaisir d'aborder cette terre.
C'est moy qui sur mon dos ay tes vaisseaux porté
Quand de me visiter tu as eu la volonté.
Et nagueres encore c'est moy qui a de la Parque
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Source : LESCARBOT, Marc. « Le Théâtre de Neptune en la Nouvelle-France », dans Les Muses de la Nouvelle-France, Paris, Jean Millot, 1612, p. 18-29.