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AVANT-PROPOS




Nos pères ont qualifié leur bannissement de l'Acadie du nom de Grand Dérangement et leurs descendants ont continué à lui donner cette appellation.

Les terres et les marais fertiles qu'ils possédaient dans les districts de Port Royal [Port-Royal], des Mines et de Beaubassin, furent confisqués et donnés à des colons d'origine anglo-saxonne, et ces localités sont aujourd'hui peuplées d'habitants de langue anglaise. Néanmoins, nous avons la consolation d'avoir à nous, en grande partie, le territoire qui formait en 1755 l'Acadie française, autrement dit le district de l'Isthme de Chignictou que jadis on nomma improprement l'Isthme de Gédaic. Ce territoire comprend les comtés de Westmorland et d'Albert. Dans ce dernier comté il y a très peu d'Acadiens, mais nous sommes très nombreux dans celui de Westmorland, bien que n'y étant pas en majorité.

De toutes les localités occupées par les Acadiens lors du Grand Dérangement, seul le comté de Westmorland possède des descendants des martyrs de 1755. À l'exception de la rivière Saint-Jean, les autres comtés du Nouveau-Brunswick n'étaient pas encore établis à cette époque. Les Acadiens de la Nouvelle-Écosse, du Cap-Breton et de l'Île du Prince-Édouard occupent des terres où il n'y avait pas d'habitants lors de la catastrophe de 1755. La grande et vieille paroisse acadienne de Memramcouk a l'insigne honneur, avec la jeune paroisse de Sackville, autrefois la Prée-des-Bourg, à Tintamarre, d'être sur un territoire que nos pères occupaient lors du Grand Dérangement. Il y avait quelques habitants au Coude (aujourd'hui Moncton) et à Petcoudiac, devenu St-Anselme du Ruisseau-des-Renards, mais leur nombre était si infime que je m'abstiens de considérer les paroisses acadiennes de l'Assomption et de St-Anselme sur le même pied d'ancienneté que les deux premières.





Source : GAUDET, Placide. Le Grand Dérangement : Sur qui retombe la responsabilité de l'Expulsion des Acadiens, Ottawa, Ottawa Printing, 1922, 84 p.