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14 LE GRAND DÉRANGEMENT  
GEORGE II aux lords commissaires? Les lords commissaires firent-ils connaître à Lawrence la réponse du roi? Est-ce bien sur cette réponse que Lawrence s'appuie quand il dit, dans sa lettre-circulaire aux gouverneurs du continent, "pour soumettre les habitants français de cette colonie aux volontés de Sa Majesté et du gouvernement ou les contraindre à quitter le pays." Rien ne le prouve.

Qu'on n'oublie pas, comme on l'a vu plus haut, que Lawrence a transmis au secrétaire d'État et aux lords commissaires copie de sa lettre-circulaire. Or, s'il n'a pas reçu d'ordres de Sa Majesté, il faut qu'il ait un front d'airain pour en avoir expédié une copie au secrétaire d'État. Lawrence avait toutes les audaces et les extrêmes impudences ne l'effrayaient nullement.

Un vieux proverbe trouve ici son application; c'est le suivant: "Qui veut noyer son chien, l'accuse de la rage"; autrement dit, quand on veut pendre quelqu'un, on trouve toujours un moyen.

Lawrence voulait expulser nos pères et il a exécuté ce crime. Pour s'en justifier, il invente mensonges sur mensonges, sa lettre-circulaire en est la preuve. Il serait trop long de les réfuter ici, mais cette réfutation se trouve dans un ouvrage beaucoup plus volumineux que cette présente étude, à laquelle il fait suite.

Je dirai, cependant, que si, comme l'affirme Lawrence, le roi d'Angleterre désapprouva le SERMENT prêté par nos pères en 1729 et 1730 - ce qui est faux - comment se fait-il que le secrétaire d'État ait écrit au nom du roi à Shirley le 14 octobre (N.S.) 1747, ce qui suit: "Alors que les émissaires français s'efforcent de faire renoncer les habitants (de la Nouvelle-Écosse) à leur allégeance à Sa Majesté."

Donc, en 1747, le roi d'Angleterre reconnaissait le SERMENT d'allégeance des ACADIENS prêté en 1729 et 1730, et en était satisfait, comme l'atteste cette lettre du 14 octobre (N.S.) 1747, déjà citée dans ce travail.

Si ce n'eût été de la campagne de dénigrement, de calomnies, contre nos pères, menée principalement par Shirley jusqu'à la fondation d'Halifax en 1749, il est bien possible que les ACADIENS, à l'arrivée de Cornwallis en 1749, n'auraient pas été requis de prêter un SERMENT absolu.

Mais d'un autre côté, les instructions royales données au gouverneur Cornwallis en 1749, l'obligeant de faire prêter le SERMENT absolu aux ACADIENS, n'avaient-elles pas pour but de faire partir les ACADIENS de la Nouvelle-Écosse? En effet, on savait depuis longtemps que jamais l'on ne déciderait nos pères à prêter un SERMENT qui pourrait les engager à prendre les armes contre les Français et les Sauvages.





Source : GAUDET, Placide. Le Grand Dérangement : Sur qui retombe la responsabilité de l'Expulsion des Acadiens, Ottawa, Ottawa Printing, 1922, 84 p.